Alors que l’UNESCO vient de publier un rapport qui montre l’urgence à recruter 44 Millions d’enseignant·es à travers le monde, il y a urgence à augmenter les salaires, améliorer les conditions de travail et réformer la Formation Initiale en profondeur.

AEF Info, un organisme de presse s’est procuré un document de travail du MENJ et du MESR, précisant le projet de réforme de la formation initiale des enseignants, son calendrier et son coût (avec un premier nouveau concours en 2025). Une licence préparatoire au professorat des écoles serait créée (permettant de dispenser ses titulaires des épreuves d’admissibilité au concours), le concours serait bien déplacé en L3 pour les 1er et 2nd degrés, et de nouvelles "écoles normales supérieures du professorat" remplaceraient les Inspé.
Cependant La FSU-SNUipp dénonce le calendrier contraint et demande avec la FSU le report de la réforme.

La dépêche d’AEF INFO :

Selon la FSU-SNESUP (syndicat FSU de l’enseignement supérieur) :

Face à la crise d’attractivité des métiers de l’enseignement, le MEN annonce une nouvelle réforme de la formation et du recrutement des enseignant·es. Une fois encore, le projet ne s’appuie sur aucun bilan sérieux de la précédente (Blanquer), que nous avons combattue, et dont il signe pourtant un aveu
d’échec. La mesure phare de la réforme proposée par G. Attal consiste à déplacer les concours des premier et second degrés (sauf agrégation) à un niveau bac + 3 dès la session 2025, escomptant une augmentation mécanique du vivier de candidat·es aux concours, le tout sans précision des contenus de formation ou de la nature et des contenus des concours.
Au-delà des réserves déjà exprimées sur le calendrier, l’absence de bilan, le mépris des acteur·rices de la formation, le dénigre-ment des INSPÉ, la volonté manifeste de « contrôler » encore davantage les contenus et les personnels… le projet tel qu’il est connu à ce jour pose un certain nombre de questions qui
demeurent aujourd’hui sans réponse :

Le MEN et le MESR sont-ils en capacité de s’assurer que les conditions nécessaires pour préparer deux sessions de concours la même année (puisqu’il est prévu de cumuler concours actuel et nouveau concours en 2025 et 2026) sont bien réunies partout (effectifs, moyens) ? Le calendrier de la plate-forme Mon Master est-il compatible avec le calendrier habituel des concours ?
Certains concours semblent pour le moment des points aveugles : concours bidisciplinaire (quelle licence ?), PLP (il n’existe pas toujours une licence directement en lien avec un concours) ? Et les multiples situations dans lesquelles il n’y a pas de licence « dédiée » ou au contraire plusieurs licences possibles (CPE, Doc, etc.) ;
Les allusions au modèle « italien » dans le projet du MEN laissent craindre la mise en place d’une sorte de numerus clausus par diminution du nombre de postes ouverts (au profit d’une augmentation des recrutements de contractuel·les), ou par la limitation du nombre de places dans les « modules » de préparation en licence. Dans le contexte actuel (et en l’absence de publication d’un plan pluriannuel de recrutement par le MEN), rien ne permet de penser que cette réforme assurera le recrutement des 329000 postes nécessaires d’ici à 2030
Des inconnues sur la formation en amont du concours et le modèle économique correspondant – en particulier pour les « modules » de licence (volumes ? financement ?) ;
Il est impossible de préparer quoi que ce soit pour la rentrée 2024 ou 2025 sans avoir connaissance des contenus et modalités des concours.
D’une manière générale, nous pensons que les mesures prévues par le projet du MEN ne sont pas de nature à régler le problème de l’attractivité du métier : agir sur l’augmentation mécanique du vivier de candidats, en déplaçant les concours, ne répond pas aux causes profondes de la désaffection pour les concours. C’est l’ensemble des questions de la rémunération et des conditions de travail qu’il faut revoir.

Ce projet appelle d’autre part plusieurs remarques :

Quels que soient le parcours et la position du concours, il faut préserver la possibilité de réorientation (passerelles) et de reconversion. Les masters MEEF doivent pouvoir accueillir les étudiant·es non lauréat·es des concours (après un échec en fin de L3) et des lauréat·es issu·es d’un autre master ou en reconversion ;
Le dénigrement systématique des masters MEEF est largement contredit par les statistiques du SIES qui montrent que 92 % des titulaires du master MEEF sont en emploi après douze mois (contre 75 % dans les masters en général)
Le modèle de formation « intégrée » que nous défendons passe par des stages qui donnent lieu à un accompagnement éclairé par les recherches universitaires des didactiques ; un tutorat mixte appuyé sur des équipes pluri-catégorielles stables et partageant une culture professionnelle universitaire ; un continuum de formation. La FDE doit s’appuyer sur l’expertise des formateur·rices susceptibles de dispenser une formation intégrée dès l’amont du concours et jusqu’au T3, en articulant étroitement les savoirs à/pour enseigner et pour l’enseignement.

Pour le SNESUP-FSU, une réforme de la FDE est assurément nécessaire, mais elle doit s’appuyer sur :

Une formation à caractère universitaire et professionnel de haut niveau, adossée à la recherche et avec une diplomation à bac + 5 – ce qui exige que soient attribués les moyens suffisants pour que puissent travailler les équipes « plurielles » ;
Une réelle ambition sur les contenus de formation, au-delà du cloisonnement et de la concurrence entre les composantes (UFR vs INSPÉ), ou des représentations naïves opposant LE disciplinaire et LE professionnel, lesquels ne sont jamais interrogés dans l’optique des besoins des futur·es enseignant·es. De ce point de vue, la place de la recherche est fondamentale ;
La concertation avec les équipes des INSPÉ et autres composantes universitaires : les modifications de maquettes doivent reposer sur un cahier des charges coconstruit, pas sur des « maquettes-type »14 du MEN ou une liste d’injonctions. Le processus doit respecter les équipes et les instances ;
Un modèle de formation qui ne considère pas l’alternance comme la juxtaposition de périodes « en classe » et « en formation », mais qui les pense ensemble, avec le temps et les moyens nécessaires pour le suivi des étudiant·es et stagiaires. Cela implique fondamentalement qu’ils et elles ne soient pas considéré·es comme des moyens d’emploi et donc soustrait·es des plafonds d’emploi du MEN ;
La possibilité de former des candidat·es et lauréat·es de différents profils : pour cela, des parcours adaptés de master doivent être prévus et les INSPÉ ne doivent pas être « repliés » sur l’accueil des seuls lauréat·es aux concours.

Dès les premières annonces ministérielles, la FSU-SNUipp informera les personnels, stagiaires, et étudiant.es des contenus et impacts de la réforme.

Pour aller plus loin, l’article de Mediapart : "Formation des enseignants : un projet de réforme hors sol et inquiétant"

Projet de réforme de la formation initiale : un retour en arrière ?

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